La Martinique entre dans l’ère des entreprises sociales avec Kaleidoscope 

Entrepreneuriat social et engagé. Kaleidoscope veut changer le monde de l’entreprise.  – Photo Pierre de Champs

Déterminée à faire émerger et accompagner la nouvelle génération d’entrepreneurs, l’organisation Kaleidoscope créée par Corinne Concy s’engage pour l’avènement d’une société plus écologique, sociale et solidaire, plus que jamais nécessaire dans le monde qui nous attend. Rencontre.

Kaleidoscope œuvre depuis cinq ans à l’émergence d’entreprises sociales, à quoi cela correspond t-il ? 

Corinne Concy, créatrice de Kaleidoscope : « L’entreprise sociale » est un modèle d’entreprise appartenant à l’Économie sociale et solidaire (ESS).

Elle met la recherche de l’efficacité économique et de la rentabilité au service d’une réponse à des problématiques d’ordre social et environnemental non résolues par l’entreprise conventionnelle, ni par les collectivités et l’État.

Pourquoi l’ESS est-elle importante pour les entreprises martiniquaises ?

Bien que le taux de création d’entreprises et d’associations sur notre territoire soit élevé, le taux de sinistralité est lui aussi très haut. Si en Martinique, les bonnes idées et un certain dynamisme sont manifestes, sans doute un nouveau modèle d’accompagnement est-il nécessaire.

Créer des structures qui soutiennent l’émergence d’idées durables c’est possible et ça marche à condition d’effectuer un travail indispensable sur la rentabilité du projet dès sa genèse.

C’est la mission portée par Kaleidoscope, une structure de l’ESS au service des structures de l’ESS ! 

Quelles sont les solutions que vous développez ?

Nous sommes à la fois :

• un incubateur, destiné à la création d’entreprise, d’activité et/ou d’emploi
• une Fabrique à Initiatives dont le rôle est de faire émerger des solutions pérennes en réponse à des problématiques locales

Faisant partie des huit cabinets locaux labellisés par Martinique Développement, notre activité est soutenue par deux métiers transversaux : la formation et le conseil.

Notre équipe d’experts œuvre à transmettre les outils nécessaires aux porteurs de projets, citoyens engagés et entrepreneurs, entreprises et dirigeants d’associations, ainsi qu’aux collectivités. 

Quels types de projets sont accompagnés par Kaleidoscope ?  

À vrrai dire, la Covid-19 a changé la donne quant à la typologie de projets accompagnés par Kaleidoscope. Avant la crise, la majorité relevaient du soutien aux personnes âgées.

Aujourd’hui, on voit émerger :

• De nombreux projets relevant de l’économie circulaire, de la transition et de l’économie de la fonctionnalité.
• Des programmes de bien-être également (naturopathie, art thérapie, etc.), destinés aux publics fragilisés par une incarcération, une situation de pauvreté ou d’addiction.
• La création de métiers autour de l’accueil des publics sensibles, âgés ou en situation de handicap.

Nous constatons par ailleurs un vif intérêt pour la question de l’alimentation, en lien avec l’hypermédiatisation du scandale du chlordécone, avec des projets tels que la structuration de réseaux de jeunes agriculteurs engagés et la création de synergies sur le territoire.

Ou encore des concepts de transformation alimentaire de proximité des excédents de production, dans une logique de lutte contre le gaspillage alimentaire. 

Quel que soit le type de projet, notre ambition est de réussir à faire émerger de nouveaux modes opératoires plus pérennes.

Tels que les modèles d’insertion par l’activité économique, ou la logique partenariale de travail en synergie…, toujours en expérimentant des solutions nouvelles liées aux nouveaux enjeux. 

La collaboration est-elle essentielle dans l’ESS ?

Créer des synergies et partenariats, être en mesure de travailler avec d’autres acteurs économiques (dont les consommateurs) est en effet indispensable pour assurer la pérennité des organisations et leur permettre de s’ancrer dans le territoire !

Collaborer avec des partenaires institutionnels, des structures, les utilisateurs finaux ou encore les “riverains” indirectement impactés, grâce à la co-construction et la collaboration, est essentiel.

Tenir compte de toutes les parties prenantes, permet de s’assurer que l’on travaille dans l’intérêt commun, de créer du lien et de l’adhésion dès la genèse du projet.

Il y a une citation qui dit ainsi “Si vous voulez savoir comment un lion chasse, n’allez pas au zoo, allez dans la jungle”. Le bénéficiaire devrait toujours être le premier partenaire, cela est même un facteur de réussite.

Les synergies renforcent les dispositifs, apportent de la complémentarité, enrichissent les concepts, améliorent le quotidien du porteur de projet en somme ! Et permettent notamment de créer des communautés, concept partenarial par excellence.

Les prochains RDV de Kaleidoscope

Alter’actifs, du 25 au 29 janvier 2021 – Tiers-Lieux Ephémère alliant conférences et ateliers en ligne, et lancement d’un site internet dédié, pour renforcer la communauté martiniquaise de l’économie circulaire et cartographier les initiatives existantes et inspirantes. 

4e programme d’incubation, à partir de début mars 2021 – candidatures début février pour 3 programmes : idéation sur 2 jours, pré-incubation de 6 mois et incubation de 6+6 mois. En partenariat avec la CTM, le FSE, l’ADEME et les EPCI.

Envisagez-vous de digitaliser vos programmes d’accompagnement ?

En partie simplement. Car nous ne pouvons pas nous permettre de passer au tout digital et ainsi exclure des populations défavorisées par le numérique car localisées en zone blanche ou n’ayant pas les moyens de s’équiper ! Cela serait contraire à notre mission.

Nous imaginons donc des solutions mixtes, de type phygitale (mêlant physique et digital, ndlr) et avons fait l’acquisition du matériel nécessaire pour pouvoir permettre aux porteurs de projet de travailler avec nous à la fois sur site ou à distance.

Le défi 2021 de Kaleidoscope est de gagner le pari du blended learning afin de pouvoir proposer des programmes mixtes, en présentiel et à distance, synchrones et asynchrones, notamment grâce aux moocs développés par l’ESSEC et son accélérateur d’entreprises sociales Antropia, avec lequel nous travaillons depuis 5 ans.

L’ESS étant résolument une affaire humaine, il y a forcément du terrain, pour aller à la rencontre des gens et maintenir le lien social ; nous ne pouvons pas être purement digitaux.