Le Parc national de la Guadeloupe est le chef de file du projet « Protéger », qui a pour but de préserver la biodiversité des milieux aquatiques tout en protégeant la population des risques encourus lors des cyclones ou des crues de rivière grâce au génie végétal. Explications avec Lucie Labbouz, responsable du projet. – Texte Ana Leone

Lucie Labbouz - responsable projet Protéger
Lucie Labbouz, responsable du projet (Photo Lou Denim)

Qu’est-ce que le génie végétal ? 

« Le génie végétal, c’est un ensemble de techniques qui consistent à utiliser les végétaux dans les ouvrages de construction. »

On peut notamment mettre en œuvre ces techniques sur les berges des rivières soumises à des phénomènes d’érosion, à la place des enrochements ou du béton. Comparé au génie civil, c’est une alternative plus respectueuse de l’environnement, moins coûteuse et dont l’efficacité augmente avec le temps. Les deux techniques peuvent cependant être complémentaires sur certains chantiers. On parle alors de « génie mixte ».

L’idée du génie végétal est de recopier les modèles naturels. C’est ce qu’on appelle une « solution fondée sur la nature », qui sait souvent mieux faire que nous !

Chaque type de végétation va avoir une fonction différente :

  • Les arbres maintiennent les berges avec leurs racines robustes
  • Les arbustes, plus souples, freinent les forts courants lors de crues
  • Les herbacées fixent la terre en créant une sorte de « tapis »

Quels sont les intérêts d’un tel procédé ? 

Le génie végétal permet de répondre à deux problématiques :

  1. la préservation de la biodiversité et la restauration des milieux naturels dégradés
  2. La protection des biens et des personnes.

Pour la préservation de l’environnement, le génie végétal permet de recréer des cordons boisés le long des rivières et de garantir un lien naturel entre le milieu terrestre et le milieu aquatique. Ces deux milieux forment un écosystème et sont indissociables l’un de l’autre : la faune terrestre utilise la rivière, les animaux aquatiques se reproduisent en pied de berge.

La forêt assure aussi des fonctions d’ombrage, d’oxygénation et de filtration des pollutions, ce qui permet d’améliorer la qualité de l’eau. 

Le génie végétal permet également de répondre à l’enjeu fort de protection pour les populations face aux risques de crues et d’inondations par exemple.

« On imagine bien qu’avec une berge bétonnée et bien lisse, le courant va s’accélérer comme dans un « toboggan ». Les crues auront alors des conséquences catastrophiques. »

Comment le génie végétal est-il développé dans le cadre du projet « Protéger » ?

La première phase du projet « Protéger » s’est déroulée de 2016 à 2018 et a visé à « faire l’inventaire » des berges bordant une quinzaine de rivières de Guadeloupe.

Une forte dégradation des rivières et des écosystèmes a été observée, due principalement aux interventions humaines sur les milieux (aménagements, pollutions, travaux réalisés en génie civil). Les écosystèmes dégradés sont également vite colonisés par des espèces exotiques envahissantes, qui n’étaient pas en Guadeloupe à l’origine et n’ont pas forcément de concurrentes. 

Il est alors apparu nécessaire de mettre en place des solutions pour lutter contre la dégradation des milieux aquatiques et développer le génie végétal en Guadeloupe en utilisant des espèces locales. 

La deuxième phase du projet « Protéger », plus opérationnelle, a consisté à déterminer les espèces qui pourraient être utilisées pour faire du génie végétal sur le territoire. Elle est pilotée par le Parc national de la Guadeloupe en partenariat avec l’INRAE Antilles-Guyane, l’INRAE Grenoble et l’Université des Antilles.

Les capacités de bouturage de 40 espèces d’arbres, arbustes et herbacées sélectionnées à l’issue de la phase 1 ont été étudiées et près d’une quinzaine de plantes pourront être utilisées sur les chantiers de génie végétal !

La Région Guadeloupe réalisera prochainement les 3 premiers chantiers pilotes utilisant des techniques de génie végétal avec les 15 espèces sélectionnées pour réaliser des « tests grandeur nature ». 

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Quelle suite est envisagée pour ce projet « Protéger » ? 

Les résultats de cette « phase 2 » nous permettent d’affirmer qu’il est possible de faire du génie végétal en Guadeloupe avec des espèces locales.

L’enjeu d’une future « phase 3 » sera de former et d’accompagner les acteurs du territoire (les collectivités, les bureaux d’étude, les entreprises qui font des travaux, etc.) à l’utilisation de ces techniques. 

Ce sera une phase de transition pour que le génie végétal prenne son envol sur le territoire avant de pouvoir être exporté à l’ensemble des Petites Antilles

Projet Protéger
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