Depuis plusieurs années, le monde du bien-être et de la cosmétique prend aussi le chemin du naturel, du local. Chaque région se lave au savon local, on s’adoucit la peau à l’huile d’ingrédient de son cru. Les Antilles-Guyane ne font pas exception. (Texte Amandine Ascensio)

Recettes de grand-mère

Nos souvenirs d’enfance sont pétris de recettes de grands-mères, de celles qui nous appliquaient des émulsions de citron pour raviver le teint, ou celles qui nous frottaient le dos avec des feuilles aux diverses vertus. Des propriétés de plantes mises en avant par les grandes marques de cosmétiques dont les produits ont envahi nos supermarchés. Mais depuis quelques années, se font une place dans les mêmes rayons des produits dits “plus naturels”, ou plus locaux, surfant sur la mode du retour au bio, au local et du refus des ingrédients issus de la pétrochimie. « Mon bébé a dû affronter une dermatose », raconte Isabelle Duplessis. « C’est finalement quand j’ai appliqué des ingrédients locaux sur sa peau que tout a disparu ». Depuis cette histoire, Isabelle a créé la marque Nessens, une gamme de trois produits de soin spécialisés pour bébés – une crème lavante, bientôt suivie d’une huile de massage et d’un liniment – à base d’ingrédients naturels. Une évidence pour elle. « Depuis qu’on a plus de connaissances sur certaines dérives de l’industrie, qu’on réfléchit plus sur ce que l’on mange, ce que l’on boit, il est assez naturel de faire attention à ce que l’on s’applique sur la peau », note-t-elle.

Parfois, c’est l’envie de rafraîchir les concepts traditionnels qui animent les créateurs de produits cosmétiques locaux : en Guyane, Karl et Léa, ont tiré de leurs nombreux voyages l’envie de valoriser les recettes de nombreux pays et notamment le leur. « Il existait déjà des savonneries mais on a mis un peu de modernité dans ce qui existait », raconte Karl Massouf, créateur de Bulle&Savon, entreprise de nombreux produits, allant des savons aux beurres corporels, des huiles de soin et de beauté. Et depuis quelques années, les marques sont nombreuses. Nateya en Martinique, valorise les extraits de fruits caribéens, La Source Cosmetics en Guadeloupe, qui met la vanille locale à l’honneur. Tous se donnent pour mission de valoriser un patrimoine naturel, local, bon et sain.

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Local, pas si local

Pourtant, rares sont ceux qui peuvent revendiquer un approvisionnement totalement local. Trop chers, manque de traçabilité, les cosmétiques locaux souffrent de l’absence de filières constituées. D’autant que la surveillance par la répression des fraudes de ces produits est assez forte, accentuée depuis que la mode du sain et local fait vibrer les consommateurs. « Pour être vendus en supermarché ou en pharmacie, il faut répondre à des normes drastiques », relèvent les créateurs des gammes locales. Alors parfois, certains retournent la situation : « Plutôt que de créer des cosmétiques, en tant que phytochimiste, j’ai voulu faire des ingrédients », explique Olivia Didon, fondatrice de Valogétal, qui propose la réalisation de cosmétiques Do It Yourself, espérant séduire aussi les fabricants locaux. Son produit phare ? Le noyau d’avocat, qui, réduit en poudre, peut rentrer dans la composition de gommages par exemple. « Je travaille aussi la noix de coco », souligne celle qui compte valoriser d’autres sous-produits de fruits locaux, comme les graines de maracudja ou de goyave. Et aussi s’agrandir. Les débuts d’une filière ?  

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