Depuis le 1er janvier, Maître Josselin Troupé préside aux destinées de l’Ordre des avocats de la Guadeloupe. Rencontre avec le nouveau bâtonnier dont le grand défi est de « réassurer les justiciables » de l’humanité de la profession.

Texte Claire Jacques – Photo Lou Denim

L’avocat est incontournable, on aura toujours besoin d’être défendu

Maître Josselin Troupé, nouveau bâtonnier, préside aux destinées de l’Ordre des avocats de la Guadeloupe

Vos confrères vous ont élu bâtonnier, que représente pour vous cette élection ? Une reconnaissance de votre implication dans la profession ?

Cette élection est un énorme honneur qui m’est fait. C’est la reconnaissance d’une très bonne connaissance du métier et de ceux qui l’exercent. J’ai, depuis mon premier jour d’exercice, été au contact des avocats, de leurs pratiques, de leurs difficultés. Ces deux dernières années, j’ai travaillé aux côtés de Madame le bâtonnier Tania Bangou en qualité de vice-bâtonnier. C’est cette expérience qui m’a vraiment donné envie de prendre les rênes du Barreau.

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Vous avez endossé cette fonction le 1er janvier. Quelles sont concrètement vos missions ?

Être bâtonnier n’est pas seulement une fonction, c’est aussi un statut. Il est à la tête d’un Ordre dans lequel s’exerce obligatoirement le métier d’avocat. Le bâtonnier va diriger cet ordre avec, à ses côtés, une sorte de conseil d’administration, élu lui aussi, qu’on appelle le Conseil de l’Ordre. En Guadeloupe, il est composé de 18 membres.

Le bâtonnier est le représentant et le porte-parole des avocats. Il est le recours des justiciables contre leur avocat en cas de réclamation. Il doit trancher les incidents entre avocats, en cherchant toujours préalablement une conciliation. Il doit aussi intervenir en cas de conflit entre un avocat et un autre partenaire (magistrat, greffier, huissier…). Enfin, il gère le Conseil de l’ordre des avocats comme le ferait un chef d’entreprise. Pour l’assister et le suppléer dans toutes ces missions, il peut être accompagné d’un vice-bâtonnier. C’est Me Jean-Nicolas Gonand qui m’accompagnera dans ma mission.

Quels vont être les grands dossiers auxquels vous allez devoir vous attaquer ? Les défis à relever ?

Je vais tout d’abord m’atteler à finaliser les projets d’importance qui ont été entamés sous la précédente mandature. À commencer par la poursuite de la réflexion d’envergure que nous menons avec différents professionnels (notaires, magistrats, géomètres, professeurs d’université…) sur le problème crucial de l’indivision successorale, notamment en Guadeloupe.

Le deuxième grand projet à mener est la mise en ligne d’un site internet digne de ce nom. Il devra permettre aux avocats et au public d’avoir un accès sérieux aux informations relatives au barreau de la Guadeloupe et aux juridictions de Pointe-à-Pitre et Basse-Terre.

Enfin, mon grand défi est d’affaiblir significativement l’épais écran de fumée qui sépare les avocats du reste des citoyens. Je compte mettre en place une communication, des événements, des process qui fassent mieux connaître le métier d’avocat. Les fantasmes, qui ont la dent dure sur le prix de nos prestations, notre inaccessibilité, notre insincérité, doivent disparaître. Par ces différentes actions, je souhaite réassurer les justiciables de notre humanité. 

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Plus généralement, quels sont les grands challenges des années à venir pour la profession ?

Le plus grand est de réussir son adaptation au monde moderne et singulièrement à l’impérialisme numérique. Nous avons tenté de résister à la submersion d’internet, des réseaux, des dématérialisations en tous genres. Mais c’est un combat que nous avons perdu. Faire appel d’un jugement, par exemple, ne se fait aujourd’hui que par internet. Il faut que dès la formation, puis dans l’exercice de la profession d’avocat, des moyens numériques soient sérieusement et efficacement mis à la disposition de tous les avocats.

Comment le métier évolue-t-il avec la société ?

Le métier d’avocat vit un vrai rajeunissement et une féminisation. C’est forcément un atout parce que cela démontre que l’avocat reflète la société dans laquelle il exerce. On observe aussi un retour des avocats en politique. Ils se présentent aux élections, ce qui, à mon avis, est une excellente chose eu égard à l’importance de maîtriser le droit lorsqu’on travaille pour le bien public. L’avocat s’adapte et évolue naturellement avec la société, il n’a pas le choix ; c’est ce que j’observe depuis 27 ans que je fais ce métier. L’avocat est, quoi qu’on en dise, incontournable, on aura toujours besoin d’être défendu.