Travailler oui, mais jouir de la vie aussi. C’est l’une des lignes adoptée par les jeunes agriculteurs de Guadeloupe. Réunis en syndicat, ils entendent transformer les pratiques agricoles et redorer le blason d’un métier réputé difficile.

Texte Amandine Ascensio – Photo Lou Denim

Un syndicat agricole pour les jeunes agriculteurs guadeloupéens

L’union, c’est la force. L’expression pourrait être la devise des Jeunes Agriculteurs, le syndicat agricole dédié aux jeunes installés et dirigés par des professionnels de l’agriculture de moins de 38 ans. En Guadeloupe, Loïc Bourdy a 31 ans et pilote l’antenne régionale du syndicat depuis quelques mois à peine. « À la fin de mon mandat (2 ans, ndlr), je souhaite avoir restructuré les choses », explique-t-il, arguant que les deux années Covid, ont un peu cassé la dynamique du syndicat. Et repartant de zéro, la communauté est désormais constituée d’une grosse soixantaine de personnes à jour de cotisation, quand 180 personnes fréquentent assidûment un groupe WhatsApp. L’objectif de Loïc, c’est d’installer des commissions thématiques, de créer des événements pour rassembler, discuter, échanger des bonnes pratiques notamment, des techniques et « faire avancer la profession ».

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C’est vrai que le projet, c’est d’assurer le renouvellement des générations. Et pour cela, on doit répondre à un gros défi.

Loïc Bourdy, dirigeant du syndicat des jeunes agriculteurs de Guadeloupe

Travailler et vivre en même temps

Car le jeune homme défend une vision : celle d’une agriculture nourricière pour son île, des cultures diversifiées, durables, propres. Lui veut rendre son exploitation autonome, avec un restaurant qui consommerait les produits de sa ferme de variétés créoles, végétaux comme animaux. « On défend tous les profils quand même », sourit-il. « J’ai coutume de le dire en plaisantant mais si un jour quelqu’un veut monter un élevage porcin urbain et intensif dans des tours comme on voit en Chine, on le défendra, même si ce n’est pas ma conviction ».

Car, selon les critères d’accompagnement du syndicat, l’exploitation doit être “viable et vivable”. Viable, c’est à dire rentable et permettre à celui ou celle qui en est à la tête d’en vivre en activité première. « Pour autant, si quelqu’un vient nous voir, avec la volonté de rester sur de la monoculture en activité secondaire, comme c’est parfois le cas dans l’activité cannière, on reste ouvert, car on sait que c’est viable », nuance-t-il. La partie vivable, elle, s’enracine dans des aspirations contemporaines : la conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle. « On a vu les anciennes générations s’épuiser dans des exploitations sans jamais prendre de vacances, et ça rend le métier moins attractif », souligne celui qui, sans révolutionner son élevage caprin, entend le moderniser un peu, le mécaniser pour mieux profiter de la vie. « J’adore voyager, alors si je peux déléguer à des employés quelques activités pour quelques jours, je le ferai. »

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Un syndicat agricole pour faciliter les installations

L’idée derrière cela c’est aussi d’ôter de la pénibilité à un métier connu pour sa dureté et d’attirer des vocations qui se font rares, selon Noémie Gourmelen, ingénieure du service alimentation et territoire durables à l’Ademe Martinique.
« La population agricole et les éleveurs sont vieillissants et le secteur attire très peu les nouvelles générations. Car seules les filières majoritaires (canne, banane…) apportent des garanties suffisantes », indique-t-elle. « C’est vrai que le projet, c’est d’assurer le renouvellement des générations. Et pour cela, on doit répondre à un gros défi », assure Loïc Bourdy, « la difficulté d’installation des jeunes agriculteurs ».

C’est la raison pour laquelle le syndicat a pris en main le Point accueil Installation, PAI, piloté par la seule salariée de l’organisation, Aline Coupan. « Mon rôle, c’est de conseiller les personnes qui viennent me voir avec un projet d’installation. Regarder où elles en sont dans le développement de leur projet : s’il y a du foncier ou non, des formations ou non, à quelles aides ils peuvent prétendre et à quelle conditions en fonction de leur profil afin de monter les dossiers adéquats et permettre, in fine, l’installation », explique la dynamique jeune femme. Un guichet souvent tenu, dans l’Hexagone, par les Chambres d’agriculture, mais qui, en Guadeloupe, passera par le réseau des JA.

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Contact : jaguadeloupe1@gmail.com