L’herbe est-elle plus verte sur l’île d’à côté ? Petit panorama des modes de production d’électricité dans le bassin caribéen pour savoir où nous en sommes de la transition énergétique dans la Caraïbe.

Texte Axelle Dorville 

La transition énergétique, où et comment ?

Isolées, déconnectées les unes des autres, les îles de la Caraïbe ont pendant longtemps été, et certaines plus que d’autres, dépendantes de l’importation de produits pétroliers pour la production d’électricité. Mais depuis maintenant une dizaine d’années, les territoires de l’arc antillais entament leur transition énergétique. Il n’y a qu’à regarder du côté Bonaire, où 13 éoliennes sont sorties de terre ; ou encore la Barbade, qui ambitionne de devenir la tête de file de la production d’énergie solaire. Chacune à leur façon, les îles caribéennes réinventent leur mix énergétique, avec l’autonomie énergétique en ligne de mire. 

Lire Aussi | Électricité décarbonée en Guadeloupe : point sur la transition énergétique

La Dominique tire parti de sa géothermie

En 2017, l’ouragan Maria ravageait l’île de la Dominique. La reconstruction fut  l’occasion d’amorcer la transition énergétique. Au sortir de la catastrophe, le premier ministre Roosevelt Skerrit déclarait ainsi vouloir faire de La Dominique “la première nation résiliente face au changement climatique”. Discuté depuis 2008, le projet de construction d’une centrale géothermique a alors connu un coup d’accélérateur.

Aux trois centrales hydroélectriques réparties sur la rivière Roseau (représentant 37 % de la production d’énergie de l’île en 2020), s’ajoutent aujourd’hui trois puits creusés dans la vallée de Roseau, destinés à produire 10 MW d’électricité issue de la géothermie. Cette installation, dont la mise en place devrait s’achever en 2024, permettra non seulement de réduire le coût de l’énergie, parmi les plus élevés au monde, mais surtout de rendre le territoire plus résilient avec 51 % d’énergies renouvelables. En plus d’alimenter 23 000 foyers, cette centrale pourrait également fournir de l’énergie à la Martinique et à la Guadeloupe. Discussions en cours. 

transition énergétique
La Dominique compte sur la géothermie pour réduire le coût de l’énergie, parmi les plus élevés au monde.

Lire Aussi | Le chemin vers l’autonomie énergétique

Barbade mise sur le solaire pour sa transition énergétique

Précurseure sur bien des sujets, l’île de Barbade ambitionne de devenir le plus important producteur d’énergie solaire de la Caraïbe. Aux 30 MW d’énergie solaire produits sur le territoire en 2020 viendront notamment s’ajouter 50 MW d’ici 2030, dans le cadre d’un nouveau projet d’installations solaires photovoltaïques. Il faut dire que l’île compte atteindre les 100 % d’énergies renouvelables en 2030, grâce à un plan d’investissement de 5 à 7 milliards de dollars pour se passer totalement des produits de combustion fossile et développer des projets de production locale et de stockage des énergies renouvelables. 

Au-delà du solaire, c’est un mix énergétique varié dont bénéficiera l’île, dans le cadre de la Barbados National Energy Policy. Un parc éolien de 4 turbines a ainsi été inauguré début mars 2023 à St John, destiné à produire 2,5 GWh d’électricité pour l’alimentation de 1 400 foyers. Une centrale électrique hybride est également envisagée pour alimenter 16 000 foyers grâce à l’énergie issue du solaire et de l’hydrogène vert. La biomasse et l’éolien offshore devraient compléter le mix énergétique. 

transition énergétique
L’île de Barbade ambitionne de devenir le plus important producteur d’énergie solaire de la Caraïbe.

L’éolien a le vent en poupe à Bonaire

De façon similaire à La Dominique, c’est une catastrophe qui aura permis le développement des énergies renouvelables à Bonaire. En 2004, la seule usine de fourniture d’électricité de l’île, basée sur la consommation de diesel, brûle. Dès lors, Bonaire décide d’entamer sa transition énergétique. Six ans plus tard, douze éoliennes sont érigées permettant d’atteindre une production de 11,1 MW en 2020, représentant un tiers de la production d’électricité de l’île néerlandaise. Afin d’atteindre 80 % d’énergies renouvelables dès 2025, une extension des capacités de production éolienne et la création d’une centrale solaire sont prévues. Au total, 33,6 millions d’euros qui ont été mis sur la table par le gouvernement pour accélérer la transition de Bonaire ainsi que de St Eustache et Saba. 

transition énergétique
Le site de Bovoni dans les îles vierges américaines pourrait être équipé d’un réseau d’éoliennes.

La République dominicaine joue dans la cour des grands 

Forte de ses 48 730 km2 de surface, l’île de la République Dominicaine dispose d’un mix énergétique varié relativement peu carboné. Si 30 % de l’électricité fournie en 2022 est issue de charbon importé de Colombie, 39 % provient du gaz naturel et 17 % de sources d’énergie renouvelable. Pas moins de 626 MW sont issus de l’énergie hydraulique et 365 MW de l’éolien, sans compter le solaire et la biomasse. 

Alors que l’île dispose de 7 parcs éoliens, 7 centrales solaires et 1 installation de valorisation de la biomasse, des dizaines de projets sont actuellement en développement, pour une production estimée de 2 000 MW issus des énergies renouvelables. Pour atteindre ces volumes statués dans le cadre du Pacto Eléctrico, la République Dominicaine bénéficie d’un prêt de la banque mondiale d’1,8 milliard de dollars et s’appuie sur des dispositifs d’incitation fiscale à destination des investisseurs engagés dans des projets de transition énergétique sur le territoire.

Lire Aussi | Voltalia Guyane : les énergies renouvelables, de la théorie à la souveraineté

La marée bientôt source d’énergie en Martinique

En 2023, trois-quarts de la production énergétique en Martinique provient des énergies fossiles. Les 25 % restants sont eux issus des énergies renouvelables, et plus précisément des deux parcs éoliens de Grand’Rivière et du Vauclin, de la centrale Albioma de cogénération biomasse et d’un parc solaire de plus de 1 000 installations photovoltaïques. L’énergie issue de l’énergie marémotrice pourrait bientôt venir enrichir le mix énergétique de l’île, avec un projet houlomoteur porté par une entreprise nantaise, dans le cadre du programme européen Interreg. Rendez-vous en 2026.  

L’énergie issue de l’énergie marémotrice pourrait bientôt venir enrichir le mix énergétique de la Martinique