Acteurs politiques et économiques caribéens étaient à Sainte Luce du 18 au 20 Octobre pour la première conférence sur “la connectivité de la Grande Caraïbe”, organisée par la CTM.
Texte Alix Delmas – Photo Jean-Albert Coopmann
Organisée par la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) et l’association des États de la Caraïbe (AEC-ACS) sur le thème : « Une mer, un ciel et un marché unique : améliorer la connectivité de la Grande Caraïbe par une approche intégrée », la conférence s’est déroulée du 18 au 20 octobre prochain à l’hôtel Karibéa à Sainte-Luce en présence des représentants politiques et économiques de premier plan de la région pour apporter des réponses opérationnelles. Une ambition nécessaire que nous décrypte Sandra Casanova(1).
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Comment développer les échanges intra-caribéens et quelles actions préconise la CTM ?
Notre adhésion aux différentes Organisations caribéennes (OECS (2), AEC, CARICOM (3)) et le déploiement de la loi sur l’action extérieure des « Outre-Mer » français (Loi Letchimy) facilitent les relations diplomatiques entre la Martinique et ses voisins caribéens. Entre pays partenaires se développent plus naturellement, des échanges commerciaux qui se traduisent par des chaînes d’approvisionnement, lesquelles interconnectent matériellement nos territoires. Pour développer les transports aérien et maritime, à l’intérieur de la Grande Caraïbe, il faut créer des flux consistants et réguliers, de marchandises et de personnes et, permettre à toutes les parties prenantes d’une même chaîne d’approvisionnement, des échanges en temps réel et l’interopérabilité de leurs systèmes d’information.
Comment ces flux naissent-ils ?
Par le tourisme, la mobilité estudiantine et professionnelle, les rapprochements familiaux, les partenariats commerciaux, les activités logistiques telles que l’import de matières premières ou produits semi-finis de pays proches (nearshoring) pour subir des ouvraisons suffisantes en Martinique puis, l’export des produits finis vers les marchés-cibles.
Des dispositifs fiscaux, douaniers et sociaux avantageux, des zones franches, des infrastructures et des solutions logistiques sont aussi des leviers pour orienter ou créer, alimenter et pérenniser des flux…
Le marché d’influence de la Grande Caraïbe, qui s’étend du plateau des Guyanes jusqu’au Golf de Mexique, c’est 800 millions d’habitants. La Martinique est à la fois dans ce marché et s’inscrit par ailleurs dans le marché de l’Union Européenne.
Aussi, en tant que Région Ultrapériphérique d’Europe (RUP), elle bénéficie des Accords de partenariats économiques (APE) qui existent entre l’UE et les pays tiers. Par exemple, les droits de douanes entre les pays du CARIFORUM et la Martinique, c’est zéro euro !
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Selon la CTM, quels sont les freins au développement des échanges commerciaux intra-caribéens ?
Les différents pays de la Caraïbe y compris la Martinique ont hérité de relations unidirectionnelles entre les anciennes métropoles et colonies, un système logistique formaté pour servir un modèle de développement économique tel que le décrit Gaston Monnerville en 1930, en parlant de la France et du pacte colonial.
« C’est une vieille institution, datant de Richelieu. Elle n’évolue pas. Dans les instructions données en 1765, par Louis XV au comte d’Emery, gouverneur de la Martinique, on lit :
– « Les colonies sont établies pour l’utilité de leur métropole. Elles doivent en consommer les produits »
– Rien n’a changé, en 1930. Le pacte sévit toujours. »
Il est donc nécessaire de sortir de ce schéma afin de mettre en place le « triangle du progrès », stratégie de développement économique qui découle de la volonté de réancrer la Martinique dans son bassin régional, à l’interface entre l’Europe, les Amériques et la Caraïbe. Le Triangle du progrès consiste en l’importation de matières premières en provenance de la Grande Caraïbe et des Amériques afin d’être transformées en Martinique en vue d’une exportation vers l’Europe, l’Afrique et le reste du monde.
(1) Présidente de la commission « Stratégies logistiques du territoire, Politique de la recherche
et de l’innovation » ; et représentante du Président du Conseil Exécutif de Martinique à la présidence du Comité spécial transport de l’Association des États de la Caraïbe.
(2) Organisation des Etats de la Caraïbe Orientale
(3) Communauté caribéenne