Depuis janvier 2022, les Français disposent de « Mon espace santé », un espace centralisant toutes leurs données de santé. Créé pour sécuriser et partager les informations portant sur la santé, cet espace a pour objectif d’améliorer la prise en charge des patients. 

Texte Marie Ozier-Lafontaine – Photo Jean-Albert Coopmann

Frédéric Ettenat, infirmier et cadre de santé, est actuellement coordonnateur régional au sein du Groupement Régional d’Appui au Développement de la e-santé (GRADeS). Sa mission : informer et sensibiliser le grand public sur Mon espace santé, afin que chacun décide ou non de l’activer et de l’utiliser. Cet espace numérique individuel permet de stocker, gérer et partager ses documents et informations de santé en toute confidentialité. Il a pour objectif de faciliter l’accès des professionnels de santé aux données de leurs patients et de permettre à ces derniers de centraliser l’ensemble des informations sur leur parcours de soin, explique Frédéric Ettenat. Petit tour d’horizon de cet espace, conçu pour fluidifier la prise en charge des patients.

« Le professionnel de santé a une vision d’ensemble sur l’état de santé et les derniers examens de son patient »

Quel est l’intérêt ?

La vocation de cette plateforme est de simplifier et d’améliorer le parcours de soins des patients. En centralisant l’ensemble des informations dans un seul et même espace, le patient retrouve ses documents ainsi que ses rendez-vous médicaux. Le professionnel de santé a, lui, une vision d’ensemble sur l’état de santé et les derniers examens de son patient. C’est un gain de temps et de sécurité pour tout le monde, qui facilite la prise en charge, notamment en cas d’urgence.

« En tant qu’infirmier, j’ai vécu un certain nombre de situations inextricables aux urgences, quand un patient inconscient ou avec des troubles de mémoire arrive sans aucun document ni aucune information sur ses antécédents et ses traitements. La prise en charge est très compliquée. Ça n’arrivera plus avec Mon espace santé », analyse Frédéric Ettenat. Dans un territoire où certaines pathologies sont surreprésentées (diabète, AVC, obésité, hypertension, cancers, insuffisance rénale…), la mise en place de cet espace revêt un enjeu de santé publique.

Quelles données y trouve-t-on ? 

L’espace comprend 4 rubriques : le dossier médical partagé (DMP), la messagerie sécurisée, le catalogue d’applications et l’agenda. Dans le dossier médical partagé se retrouvent toutes les informations relatives à la santé du patient. Son profil médical, avec ses antécédents, ses allergies, ses vaccinations (…) ainsi que l’ensemble de ses documents de santé : comptes rendus de consultation, d’imagerie ou d’hospitalisation, résultats d’analyses, ordonnances…

La messagerie sécurisée permet d’échanger directement avec son médecin, une fois que ce dernier a initié la conversation. Professionnels de santé et patients peuvent partager des documents comme des ordonnances, des photos, des questionnaires. « C’est particulièrement intéressant quand on est suivi par un praticien situé en Hexagone ».

Le catalogue d’applications permet, quant à lui, d’utiliser des applications (montres connectées, applications mobiles…) capables de transmettre des informations à Mon espace santé. « C’est déjà le cas avec l’application FreeStyle LibreLink par exemple, qui mesure le taux de glycémie des diabétiques. L’objectif est qu’un maximum d’applications de ce type soient connectées avec Mon espace santé ».

La dernière rubrique est l’agenda de santé, bientôt disponible. Il centralisera l’ensemble des rendez-vous médicaux du patient. « Cela évitera de perdre le petit papier qu’on nous remet souvent à l’hôpital (rires) ! ».

Lire Aussi | Santé mentale : MentalPrev vous aide à sortir du déni

Un outil obligatoire ?

Mon espace santé n’est pas obligatoire. En revanche, entre mars et juillet 2022, les Martiniquais ont reçu, par mail ou par courrier, un message leur indiquant que sauf opposition de leur part dans les 6 semaines à compter de réception du courrier, Mon espace santé serait automatiquement créé. « Nous n’avons pas les chiffres précis à l’échelle locale, mais en France hexagonale, seuls 2 % des assurés s’y sont opposés ». À noter que les assurés peuvent à tout moment clôturer leur compte, et le réactiver en cas de changement d’avis.

Comment activer son compte ? 

« C’est très simple ! », assure Frédéric Ettenat. « Il suffit de se rendre sur www.monespacesante.fr ou de télécharger l’application sur son smartphone. L’assuré a besoin de son numéro de sécurité sociale, du numéro de série de sa carte vitale et d’un code provisoire généré et transmis par mail ou SMS. Dès que son compte est activé, il peut y intégrer tous ses documents de santé. Les professionnels de santé dont les logiciels sont interfacés avec la plateforme pourront eux-aussi y déposer les documents de santé du patient ».

En cas de difficulté, un support téléphonique est disponible. Il faut composer le 3422, qui répond du lundi au vendredi de 8h30 à 17h30 (heure de France hexagonale). Ne sont traitées que les questions relatives à Mon espace santé (activation, numéro de série de carte vitale illisible, clôture…)

Quid des publics éloignés du numérique ?

Il s’agit d’un enjeu important pour la mise en place de Mon espace santé, d’autant que la Martinique est aujourd’hui la région la plus âgée de France. « En plus de la fracture numérique (problèmes d’accès et d’usage du numérique), il y a aussi la problématique des personnes en situation d’illectronisme, c’est-à-dire celles qui ont du mal à utiliser les outils numériques (33 % des Martiniquais !). Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, il n’y a pas que les personnes âgées qui sont concernées. Des jeunes, des adultes et des personnes porteuses de handicap sont aussi concernés ». Pour accompagner au mieux ces populations, le coordonnateur est chargé de tisser sur le territoire un réseau d’ambassadeurs dont le rôle est d’accompagner, d’informer et de communiquer autour de l’application. « N’importe qui peut faire partie des ambassadeurs. Ceux-ci peuvent être recrutés au sein des associations, CCAS, cyberbases, France services mais aussi parmi les professionnels de santé, les étudiants… », précise Frédéric Ettenat.

Ces données sont-elles bien protégées ?

C’est la principale crainte des assurés. Crainte accentuée par les récentes cyberattaques d’hôpitaux. « Il faut savoir que certains systèmes piratés sont obsolètes ; d’autres sont bien sécurisés mais infiltrés grâce à l’usage de mails frauduleux (phishing) », signale Frédéric Ettenat. La sécurité des données de Mon espace santé est fiable et repose sur d’importantes garanties techniques, auxquelles s’ajoute la conformité au Règlement général de protection des données (RGPD). Il est néanmoins important pour les assurés de faire attention à tout mail frauduleux leur demandant leurs identifiants et/ou codes de Mon espace santé et de respecter la triple sécurité d’accès : identifiant + mot de passe (respectant les critères) + code d’accès unique à chaque connexion. L’identification biométrique est également possible pour se connecter depuis un appareil mobile.

Cap sur la e-santé  

« La e-santé est un levier majeur pour améliorer l’accès aux soins, la prise en charge des patients et faciliter le travail des professionnels de santé. De plus, la e-santé permet de réfléchir au suivi des patients en termes de parcours de soins, en coordonnant efficacement les différents professionnels de santé autour de la problématique du patient », indique M Tourreilles, directeur du GRADeS. Dans un territoire insulaire comme la Martinique, où certains patients sont traités entre la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane ou l’Hexagone, avec des praticiens de diverses disciplines, la e-santé est un atout indéniable.

Le volet national repose sur un Identifiant national de santé (qui permet de disposer d’une même identité patient partagée entre tous les acteurs de soin) et sur l’identification des professionnels de santé par le déploiement de la messagerie sécurisée de santé ou le certificat Pro Santé Connect.

Le volet régional prévoit l’accompagnement des établissements médico-sociaux dans l’intégration du numérique dans leurs pratiques, l’appui dans la mise en place d’outils numériques de coordination (pour le suivi de patients impliquant l’intervention de plusieurs spécialistes) ainsi que le projet IMAG (qui facilite la prise en charge interrégionale de patients, grâce au partage facilité d’imagerie radiologique). 

GIP GRADeS de Martinique
2, rue Case Nègres
97232 Le Lamentin
0596 53 28 79
www.sante-martinique.fr