Développement. La piste de l’aéroport Guadeloupe Pôle Caraïbes est actuellement refaite à neuf, opération indispensable pour accompagner le retour à la croissance du trafic. – Texte Adeline Louault 

En quoi consiste ce chantier lancé en novembre 2021 ? 

Alain Bièvre, président du directoire : Il comprend la réfection du revêtement de la piste d’atterrissage (couche de roulement), une étape qui doit être effectuée tous les 10 à 15 ans, mais aussi le renforcement structurel de cette dernière sur 20 à 30 cm d’épaisseur. Cette opération hors norme est indispensable pour une infrastructure âgée de plus de 50 ans qui joue un rôle essentiel dans l’ouverture au monde de notre territoire.

L’objectif est d’accompagner la densification du trafic « gros porteurs » qui résulte de l’augmentation du trafic passager. Les travaux visent également à mettre l’équipement en conformité avec les nouvelles exigences liées à notre certification européenne EASA en sécurité aéroportuaire. Ainsi, nous élargissons la raquette pour un retournement sécurisé des avions et renforçons le balisage (éclairage au sol de guidage des avions) pour améliorer les conditions d’exploitation et de sécurité de la piste.

« L’objectif est d’accompagner la densification du trafic « gros porteurs » qui résulte de l’augmentation du trafic passager. »

Le chantier se poursuit alors que la piste est en condition d’exploitation. Comment les travaux s’organisent-ils ? 

Ils sont réalisés de nuit afin que, chaque matin, la piste soit rendue opérationnelle pour accueillir le trafic aérien. Le chantier a été découpé en phases successives de façon à minimiser l’impact sur les périodes d’ouverture de la piste. Ce travail de phasage a été préparé trois ans en amont, sous le contrôle de la DGAC (Direction Générale de l’Aviation Civile) et en concertation avec les compagnies aériennes, afin que ces dernières puissent adapter leurs programmes de vols.

Chaque soir, après le dernier mouvement d’avion, la piste est fermée en coordination avec le contrôle aérien, pour permettre le démarrage du chantier. Le lendemain matin, la conformité des travaux et de la zone de chantier est vérifiée par un expert en sécurité aéronautique avant l’inspection minutieuse de la piste par notre équipe de techniciens IAM (Inspection Aire de Mouvement) afin de nous assurer qu’elle peut être rouverte au trafic aérien en toute sécurité. 

Quel est l’impact économique du chantier ? 

Il est loin d’être négligeable puisque, sur 25 entreprises mobilisées, 21 sont guadeloupéennes. Au total, 60 % de la main d’œuvre est locale. En outre, le projet favorise l’emploi et l’insertion. Au-delà des embauches liées aux besoins de main d’œuvre (9 embauches nettes), ce chantier a permis de former des jeunes à des compétences spécifiques qui seront par la suite utiles au BTP local. Enfin, des volontaires du RSMA sont impliqués sur ce projet, à travers 3 500 heures de formation (principalement pour les métiers de conducteurs d’engins, électriciens, animateurs QSE…).

Chantier Aéroport Pôle Caraibes - Guadeloupe

« Sur 25 entreprises mobilisées, 21 sont guadeloupéennes. Au total, 60 % de la main d’œuvre est locale. »

Qu’en est-il de l’empreinte carbone et qu’est-il prévu pour la compenser ?

Les travaux s’inscrivent dans une démarche durable. Nous travaillons avec l’Office National des Forêts (ONF) afin d’intégrer ce chantier dans le cadre du label « bas carbone ». Ce premier partenariat permettra, nous l’espérons, le lancement de ce label en Guadeloupe. 

Sur les 5 900 tonnes de CO2 du bilan carbone du chantier, 5 450 seront compensées sur une période de 30 ans par la replantation d’arbres sur un espace qui pourrait être l’équivalent de 20 hectares de mangrove. Les 450 tonnes restantes sont économisées par diverses actions et adaptations des méthodes industrielles, résultant en un chantier autonome : les matériaux sont réutilisés, des centrales de production ont été installées sur site et une base-vie a pris place à proximité du chantier pour minimiser les déplacements d’engins.

Piste Aéroport Pôle Caraibes - Guadeloupe

« Nous travaillons avec l’Office National des Forêts afin d’intégrer ce chantier dans le cadre
du label « bas carbone ». »

Le chantier de renforcement de la piste s’étend jusqu’à fin juin. Quels sont les autres travaux prévus cette année ? 

La SAGPC poursuit son programme d’investissements, même si celui-ci a été adapté en raison de la crise sanitaire. Les chantiers que nous menons actuellement s’articulent autour de deux « familles » : les investissements réglementaires, qui permettent d’améliorer la sureté et la sécurité des opérations aéronautiques, et les chantiers liés à l’amélioration de la qualité de service et à la diminution de notre empreinte carbone.

Parmi les chantiers de la première famille, en plus de la piste, nous avons prévu de refaire les parkings et voies de circulation avions en béton qui ont plus de 25 ans, et nous avons lancé la construction d’un bâtiment qui accueillera les nouveaux équipements de contrôle des bagages dits de « standard 3 ». 

Travaux aéroport Pôle Caraibes - Guadeloupe

Les chantiers de la 2nde famille verront notamment sortir de terre une ferme photovoltaïque de 5 hectares coté piste et l’équipement en ombrières photovoltaïques du parking P2. Ces 2 fermes, additionnées aux installations photovoltaïques installées en 2020 sur la toiture du bâtiment fret, permettront de réduire considérablement la consommation d’énergies fossiles de l’aéroport.

Nous menons également un projet d’extension de notre terminal T2 (régional) qui augmentera la capacité en salle d’embarquement et dotera ce terminal d’une salle de livraison bagages dédiée pour améliorer la qualité d’accueil et le confort des passagers. 

Nous avons enfin l’ambition de relancer notre projet phare, l’extension du terminal T1, qui a été suspendu. Pour cela, nous avons sollicité des soutiens financiers complémentaires, notamment auprès des autorités de gestion des fonds européens, afin de compenser les 30 à 40 M€ de pertes liées aux deux années de crise covid.

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Avec cette série de travaux, la SAGPC entend préparer l’avenir de la Guadeloupe. Après deux années moroses liées au contexte sanitaire, quelles sont les prévisions en termes de trafic ?

Les années 2020 et 2021 ont vu le trafic plonger à la moitié de ce qu’il était en 2019, année record pour la SAGPC avec 2,5 millions de passagers. Depuis la fin de l’année 2021, nous constatons, avec le ralentissement de l’épidémie et la levée progressive des mesures de restriction affectant le transport aérien, une reprise du trafic qui nous amène, actuellement, sur une tendance autour de 70 % du trafic de 2019. Cette reprise devrait se poursuivre graduellement et nous permettre d’envisager, pour l’année 2022, un atterrissage autour de 75 % à 80 % du trafic de 2019.

L’attractivité confirmée de la destination par les opérateurs de tourisme, couplée à « l’effet Route du Rhum » dont nous observerons les retombées fin 2022 et tout au long de 2023, nous permettent d’envisager l’avenir avec un raisonnable optimisme et de bâtir nos projets sur une hypothèse de retour au niveau d’avant crise pour 2024 ou 2025.

« L’attractivité confirmée de la destination, couplée à « l’effet Route du Rhum » nous permettent d’envisager un retour au niveau d’avant crise pour 2024 ou 2025. »

Un chantier « hors norme »
Chaque nuit, une course contre la montre s’engage pour permettre la réalisation des travaux et la réouverture de la piste en temps et en heure.

En quelques chiffres : 
• Ce chantier représente un investissement de 35 millions d’euros, dont 10 M€ sont financés par l’Europe (FEDER).
• 120 000 heures de travail au total réparties sur de larges amplitudes et une superficie équivalente à 30 terrains de football.
• Pour répondre aux exigences techniques du chantier, certaines machines – dont les « méga-finisseurs » – sont utilisées pour la première fois sur l’archipel. On dénombre ainsi 4 finisseurs (machines qui appliquent les enrobés), dont 2 de 10 mètres et 2 de 5 mètres pour mener à bien les opérations techniques.
• 120 personnes peuvent être mobilisées simultanément sur le chantier, dont 4 services opérationnels pour mener à bien ce ballet entre chantier et trafic aérien maintenu.

Société Aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes  
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