C’est une petite révolution dans le monde du travail en Europe, mais une évidence dans certains pays du monde. La mise en place d’un congé menstruel, qui permet aux femmes victimes de règles douloureuses de s’absenter un jour par mois du travail sans perte de salaire fait débat, mais s’installe peu à peu dans le quotidien de nos sociétés, avec ses pour et ses contre !

Pourquoi un congé menstruel ?

Les règles, ce phénomène physiologique qui touche chaque mois 51 % de la population mondiale pendant environ 35 ans, méritaient bien qu’on se penche sur leur sujet en termes d’impact professionnel. Car les règles, ce n’est pas que la désagrégation de l’endomètre, c’est tout un florilège de « dommages collatéraux » qui viennent agrémenter le cycle de manière plus ou moins tolérable. SPM (syndromes prémenstruels), douleurs abdominales sévères, migraines, nausées ou endométriose ne sont qu’un extrait des contraintes physiques que peuvent connaître certaines femmes, auxquelles s’ajoutent les conséquences psychologiques qui en découlent – baisse de la productivité, honte et même parfois dépression. L’idée du congé menstruel est donc de leur offrir une possibilité de ne pas travailler ou télétravailler, en leur évitant de poser des congés payés. 

On en est où ?

En France, le congé menstruel n’est pas inscrit dans la loi, libre à chaque entreprise de l’instaurer. Trois structures ont ouvert le bal (une entreprise de fabrication de mobilier de bureau en bois écoresponsable, un spécialiste du recrutement de donateurs au profit d’ONG, et enfin Critizr, expert du parcours clients) et font toujours figure d’exception. Pourtant, selon un sondage IFOP de septembre 2022, 66 % des femmes salariées seraient bien favorables au congé menstruel et 64 % d’entre elles pourraient y avoir recours… En Europe, l’Espagne fait figure de pionnière avec son projet de loi adopté en mai dernier, affichant malgré tout un retard flagrant sur le Japon, qui a établi un congé menstruel en 1947 (!), la Corée du Sud (2001), l’Indonésie (2003), Taïwan (2013) ou la Zambie (2015).

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Le mieux, ennemi du bien ?

Mais, le congé menstruel est-il une vraie bonne idée ? Selon Louise Jussan, chargée d’étude au pôle Politique/Actualités de l’IFOP, « il s’agit d’un sujet compliqué à aborder au travail. À cela s’ajoute la crainte puissante que l’utilisation du congé menstruel donne lieu à des suspicions, des moqueries, voire devienne un frein pour la carrière professionnelle des femmes, en termes de recrutement ou d’évolution ». Et selon Laetitia Vitaud, auteure et conférencière sur le futur du travail, « un congé baisse de forme pour tous les salariés » serait plus égalitaire, moins stigmatisant et ne violerait pas le secret médical. Révolutionnaire.

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