Importation. En tant que territoire insulaire, la Martinique doit pouvoir compter sur un système d’importation fiable et performant. Mais en quoi consiste ce dernier ? Exemple avec un produit de grande consommation, de l’usine au Grand Port Maritime de Martinique. (Texte Yva Gelin – Photo Jean-Albert Coopmann)

Plates, rondes, petites, grandes, allongées, courbées, avec ou sans gluten ou au blé complet… Les pâtes, quelles que soient leurs formes ou compositions, font l’unanimité dans tous les foyers. Un aliment du quotidien qui pourtant n’arrive pas sur notre île en un jour. Du fabricant au consommateur, c’est un véritable périple qu’effectuent nos pâtes avant de se retrouver dans nos assiettes. Bienvenue au cœur de ce parcours.

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Le transitaire, acteur incontournable du transport de marchandises

C’est depuis l’usine que débute le périple. Imaginons une usine de pâte lambda en Europe. Pour commencer, le premier et principal acteur sur l’ensemble du trajet est le commissaire de transport également appelé le transitaire. « Nous sommes des organisateurs du transport », explique Jean-Claude Florentiny, président du syndicat des transitaires. « Depuis le positionnement du conteneur chez le fournisseur jusqu’à l’arrivée de la marchandise chez le client final. » Ainsi, c’est avec le commissionnaire de transport qu’est organisé le déplacement des marchandises et cela débute par un transporteur qui positionne le conteneur sur le lieu de production où sera effectué l’empotage c’est-à-dire, comme l’explique Jean-Claude Florentiny, « le remplissage du conteneur sur un lieu convenu ».

Le Grand Port Maritime de Martinique depuis la mer
Les portiques de déchargement peuvent résister à des vents de 277 km/h. 

Les formalités avant le départ des conteneurs

Les multiples sachets de pâtes, une fois réunis au sein d’un même conteneur scellé sont ensuite envoyés dans un des ports de France Hexagonale. « Il peut s’agir du Havre, de Marseille, de la Bretagne ou encore de Dunkerque. Mais il faut savoir que le port principal à traiter avec les Antilles est celui du Havre », précise le président du syndicat des transitaires. Avant le départ du conteneur de pâtes pour les assiettes martiniquaises, le commissaire en transport effectue toutes les formalités d’exportation, à savoir le connaissement qui fournit le détail de ce que contient le conteneur, comme le poids et le volume. À l’arrivée, le transitaire s’occupe également dans ce même temps des formalités douanières à l’importation qui comprennent le paiement de la TVA, l’octroi de mer et les droits de port, ainsi que d’autres droits additionnels. « C’est également à cette étape que nous payons les agents de la compagnie maritime pour le débarquement. »

« Nous effectuons en ce moment une étude sur la résilience du port dans 50 ans, afin que chaque amélioration soit réalisée avec la prise en compte de facteurs comme le changement climatique. »

Entrée unique : le Grand Port Maritime

Une fois arrivées sur l’île aux fleurs, les pâtes n’ont le choix que d’une seule et unique porte d’entrée : le terminal de la pointe des Grives du Grand Port maritime de Martinique à Fort-de-France. 90 % de la marchandise importée sur l’île, c’est-à-dire toute marchandise conteneurisée et arrivant par bateau (produits frais et animaux), passe par le terminal de la pointe des Grives. C’est donc là que nos pâtes sont débarquées. « Pour les 10 % restants », explique Yvanh Georges Alingery, directeur d’exploitation, « d’autres zones spécifiques sont dédiées à d’autres types de marchandises ».

La surface de la pointe des Grives est grande comme deux terrains de foot et en plus de la marchandise à destination de la Martinique, ce terminal réceptionne également la marchandise en transbordement, c’est-à-dire en attente pour un autre port de la Caraïbe. Par conséquent, indique le directeur d’exploitation, « nous sommes très vigilants à tous les facteurs qui pourraient impacter le bon fonctionnement du port, aussi bien aujourd’hui que demain. En ce sens, nous effectuons par exemple en ce moment une étude sur la résilience du port dans 50 ans, afin que chaque amélioration, chaque infrastructure soit réalisée avec la prise en compte de facteurs comme le changement climatique ».

La zone de stockage des conteneurs du Grand Port Maritime de Martinique
Tout près de Fort-de-France, la plateforme de stockage des conteneurs s’étend sur 16 hectares.

15 à 20 conteneurs par heure au Grand Port maritime de la Martinique

Les pâtes sont donc accueillies par le Grand Port maritime de la Martinique qui effectue le déchargement via une opération dite de manutention verticale réalisée grâce aux portiques. Concrètement, la manœuvre consiste à récupérer le conteneur sur le porte-conteneur pour le poser à terre. Une opération de déchargement qui dans les faits paraît simple mais mobilise un équipement d’ampleur. Les portiques au nombre de trois sur le terminal de la pointe des Grives, sont ces imposantes structures métalliques bleues électriques de forme carrée. D’une valeur de 15 millions d’euros, le portique est conçu pour résister à des vents allant jusqu’à 277 km/h. « Nos portiques », explique Christophe Sabino, responsable exploitation des marchandises, « sont ce que l’on appelle des low profiles, en comparaison aux portiques à bec que l’on pourrait voir ailleurs. Le portique low profile est une de nos spécificités car du fait de la proximité avec l’aéroport nos équipements ne doivent pas dépasser une certaine hauteur ».

Des conteneurs, il en arrive tous les jours et lors d’une opération de déchargement ce sont en moyenne 15 à 20 conteneurs qui, par heure, sont posés sur le sol martiniquais. Afin d’être en adéquation avec le rythme et la quantité des importations, le Grand Port Maritime de la Martinique se dotera prochainement d’un quatrième portique. L’objectif ? Renforcer la position stratégique de la Martinique en offrant une place de choix au transport maritime et en favorisant le transbordement de la Martinique vers d’autres îles de la Caraïbe.

« Nous n’avons pas le droit d’être en panne ou à l’arrêt car c’est tout l’approvisionnement de l’île qui serait impacté. »

« Nous n’avons pas le droit d’être à l’arrêt »

Après l’opération de manutention verticale effectué avec les portiques, la manutention horizontale, opération lors de laquelle les conteneurs sont répartis sur la zone de stockage du port, est prise en charge par des manutentionnaires qui répartissent ensuite les conteneurs sur une zone de 16 hectares que le Grand Port met à disposition. Étant le seul point d’entrée de la Martinique pour les marchandises arrivant par bateau, le Grand Port maritime assure le déchargement et le stockage de tous les containers de produits alimentaires et non alimentaires qui se retrouvent ensuite en magasin. « C’est un point névralgique. Nous n’avons pas le droit d’être en panne ou à l’arrêt et cela demande une organisation particulière du travail », explique Yvanh Georges Alingery, directeur d’exploitation, « car c’est tout l’approvisionnement de l’île qui serait impacté ». L’effectif du personnel du Grand Port compte une centaine de personnes. Sur cet effectif total, la pointe des Grives mobilise soixante personnes dont 22 portiqueurs en plus d’équipes d’électriciens, mécaniciens… « Sans compter que nos équipes sont mobilisables 24/24h », précise Christophe Sabino. « Nous devons être fiers de son efficience et son fonctionnement doit être sacralisé comme un service essentiel au service de nos concitoyens ».

Chargement de conteneurs au Grand Port de Martinique
Des chariots élévateurs qu’on appelle des « cavaliers » prélèvent les contenaires et les chargent sur les camions qui iront livrer aux acheteurs sur toute la Martinique. 

Ouverture du conteneur

Enfin, toujours orchestré par le commissaire de transport, le conteneur est ensuite récupéré dans cette zone d’échange par un transporteur. La plupart du temps, le conteneur est entreposé dans une ultime zone de stockage de l’entreprise destinataire où le conteneur est dépoté, c’est-à-dire vidé pour que la denrée soit enfin distribuée et mise en rayon. C’est d’ailleurs la seule fois où le conteneur est ouvert, ce dernier restant fermé tout le long du trajet avec ses scellés. Dans ce périple le paquet de pâtes ne fait pas l’objet de contrôle particulier par la Douane, c’est pourquoi le transitaire doit faire preuve comme le précise Jean-Claude Florentiny « de beaucoup d’attention, car nos responsabilités sont très élargies et touchent aussi bien le transport que les formalités douanières, il est garant de toute la chaîne d’approvisionnement »

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À chaque marchandise, son point d’entrée

• Pointes des Grives : marchandise conteneurisée, produit frais, animaux
• Port de l’hydrobase de Fort-de-France : marchandises en vrac
• Quai de la pointe Simon et terminal des Tourelles : activités touristiques
• Appontement pétrolier de Bellefontaine : importations dites liquides, c’est-à-dire produits pétroliers
• Plateforme de Cauet : matières premières gérées par la SARA

Comment est calculé l’octroi de mer sur une marchandise ?

L’assiette de calcul de l’octroi de mer = valeur marchandise + transport + assurance de la marchandise transportée 

Grand Port de Martinique
www.martinique.port.fr