Les communautés apprenantes, réseaux d’avenir aux Antilles-Guyane ?

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Axelle Dorville

Synergie. Kaleidoscope accompagne l’émergence et le développement d’entreprises sociales, engagées et à impact positif en tant qu’incubateur, Fabrique à Initiatives, cabinet de conseil, organisme de formation, mais aussi par le biais de communautés apprenantes. De quoi s’agit-il ? 

Qu’est-ce qu’exactement une communauté apprenante ? 

Cassandra Bérénice, chargée de mission : Il s’agit d’une communauté vivante inspirée de la nature, en ce qu’elle a conscience que toutes les personnes qui la composent sont interdépendantes et peuvent apprendre les unes des autres. 

« En permettant les échanges de bonnes pratiques, de savoir-faire, de modes de fonctionnement, la communauté apprenante favorise l’émergence des personnalités et le dépassement de soi, et s’enrichit au fur et à mesure de son existence. »

Comme une plante qui grandit petit à petit et étend ses branches jusqu’à porter ses fruits ! 

Quel est leur intérêt ?

Corinne Concy, fondatrice : L’intérêt est multiple ! La logique de partenariats entre entrepreneurs permet la mutualisation des idées, la co-création, l’entraide.

Aussi, en travaillant ensemble, face à une problématique, on peut se rendre compte que telle personne détient une pièce du puzzle et qu’une autre personne en détient une autre, et que l’on peut générer de la valeur en co-créant de nouveaux produits ou services. 

L’isolement par ailleurs du chef d’entreprise peut créer des situations décourageantes, en laissant le porteur de projet démuni face à une problématique; alors qu’entre pairs, on peut obtenir la réponse tant espérée, bénéficier d’idées, de retours d’expériences, tout simplement de choses auxquelles on n’avait pas pensé qui permettent d’enrichir son projet

On peut ainsi gagner du temps et éviter de perdre de l’énergie, ce qui est inestimable pour un porteur de projet, notamment pour conduire une initiative partenariale ou répondre à un appel à projet ! 

Par ailleurs, ces communautés sont des espaces particulièrement épanouissants car on se forme, on rencontre des gens, on se fait de vraies idées sur des thématiques diverses, on se confronte, on découvre, on expérimente.

Il s’agit également de créer des synergies de coopération et être dans le développement de dynamiques d’intelligence collective pour travailler ensemble sur des outils qui pourront être appliqués au sein de la communauté mais également être dupliqués dans les activités respectives de chacun.

Animation communauté apprenante

Quels peuvent être les formats des communautés apprenantes ?

Cassandra Bérénice, chargée de mission : Cela peut être des fablabs, des espaces dans lesquels des personnes de tout bord vont se réunir (designer, étudiant, asso, entrepreneur, citoyen, décideurs, ingénieurs, etc) et chacune avec leurs compétences, contribuer à faire émerger des solutions. 

Et cela peut aussi être un living lab. L’idée des living labs est de réunir des membres de la communauté, afin qu’au-delà de l’aspect “réseau et mutualisation des savoir-faire”, ils soient en mesure de créer de la valeur ensemble, de créer un nouveau produit ou un nouveau service.

Les living labs permettent de dégager des solutions pragmatiques par la collaboration et l’expérimentation. Dans le living lab, ce n’est donc pas seulement du design, tu vis le truc. Et ce qui en ressort, c’est 100% de bénéfices pour tout le monde.

« En réunissant des personnes aux compétences différentes, en additionnant les savoir-faire, on peut proposer des services utiles à la communauté et permettre à chacun de s’enrichir de l’émulation collective. »

Comment est née la communauté apprenante Kaléidoscope ? 

Corinne Concy, fondatrice : En 5 ans d’existence, nous nous sommes rendues compte qu’au-delà de la mise en œuvre de nos métiers (incubateur, formation, conseil), il nous fallait également créer et renforcer les liens, la mise en réseau et les échanges entre les porteurs de projet et entrepreneurs accompagnés.

Le développement, l’animation, la cohésion d’une communauté apprenante est alors également naturellement devenu un de nos métiers. 

Il faut dire qu’en tant que structure de l’ESS soutenant des projets de l’ESS, notre métier est par définition d’accompagner des projets reposant sur des dynamiques collectives.

La gouvernance partagée, la collaboration, les relations avec leur territoire, des personnes qui se mettent ensemble pour travailler et innover pour un monde meilleur : c’est tout simplement la base de l’ESS ! 

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Comment fonctionne la communauté apprenante de Kaléidoscope ? 

Corinne Concy, fondatrice : La liberté d’entrer et de sortir, la participation, le partage de valeurs et surtout le principe de co-développement d’outils cohérents pour notre territoire sont le socle de notre communauté : une communauté fluctuante d’alter’acteurs et alter’actrices qui se donne l’opportunité de pouvoir grandir, construire et innover par l’échange et le partage.

« Nous avons fait le choix de fédérer par les valeurs, plutôt que par une structure associative ou encore par une contribution financière. »

Dans le cadre d’une démarche volontaire, nos bénéficiaires, clients et partenaires acceptent de recevoir notre newsletter et tout part de là. Par ce vecteur, nous les tenons informés de nos actualités et chacun peut y prendre part selon ses aspirations.

Equipe Kaleidoscope - Martinique

Pouvez-vous nous parler de vos alter’acteurs et alter’actrices ? 

Victoria Elisabeth, contributrice : Ce sont des entrepreneurs et citoyens engagés qui à un moment ou à un autre ont interagi avec nos services pour une information, découvrir nos services, participer à un séminaire, une formation, ou bénéficier d’un conseil.

Ce sont des Martiniquais et Martiniquaises qui ont décidé de s’engager pour le changement positif, en proposant des activités et initiatives qui permettent de changer le monde et d’améliorer le quotidien.

Ce ne sont pas des personnes que l’on peut identifier par leur âge, leur origine professionnelle, leur CSP.

« Sé an moun ki pa ka fè dèyè sé an moun ki pa ka pè. Sé an moun ki sav mantjé tombé sé pli bel pa. Sé an moun ki ka sonjé ich-li é sa i ka kité ba’y. »

« Sé an moun ki ka milité ba an mond koté tout moun sé moun é koté piti ka kouté gran é gran ka kouté piti. »

*« Un alter’acteur ou une alter’actrice est une personne qui ne se démonte pas. Une personne qui sait que l’échec n’est qu’une étape vers la réussite. Une personne qui pense aux générations futures et à ce qu’elle leur laissera. Une personne qui milite pour un monde dans lequel tout.e.s ont leur place et dans lequel les petits écoutent les grands, et les grands les petits. »

En quoi la communauté d’alter’acteurs et alter’actrices de Kaleidoscope diffère des réseaux traditionnels selon vous ? 

Cassandra Bérénice, chargée de mission : Pouvoir trouver des partenaires en affaires, pour pouvoir innover et créer de nouveaux services, trouver des réponses, rencontrer les bonnes personnes, tout cela est possible au sein de communautés.

« Dans notre vision, on intègre une communauté d’abord car il existe un intérêt général à le faire. »

Se reconnaître dans le désir de mettre en forme un projet respectueux de l’environnement et de l’humain pour pouvoir construire la Martinique de demain, par exemple.

Plutôt que faire partie de la communauté pour utiliser le réseau à des fins personnelles, l’intérêt particulier est alors de grandir personnellement pour contribuer à ce projet qui est plus vaste que soi. Et c’est là toute la nuance. 

  • Je me reconnais dans les valeurs de l’ESS ?
  • J’adhère à la vision du collectif ?
  • J’accepte de ne pas être dans une logique à sens unique ?

Pour nous, c’est cela qui mènera une personne à décider de faire partie de la communauté, pour un temps ou pour plus longtemps. 

Dans cette communauté d’alter’acteurs et alter’actrices, j’adopte une posture dans laquelle je n’accepte plus que les choses se fassent sans moi, je veux qu’elles se fassent avec moi.

Dans cette posture, je souhaite m’intégrer à la communauté afin de pouvoir participer à des réflexions conjointes, valider les orientations prises, confronter ce que je vis au quotidien avec d’autres personnes, rencontrer des personnes différentes de moi. Et la contribution possible n’est pas figée, et n’est surtout pas financière. C’est là la différence subtile.

Bien entendu, nous avons imaginé un mode d’animation, une façon d’accueillir, une méthodologie et des outils qui nous sont propres, mais plus que des règles réductrices, ce sont les valeurs partagées qui nous guident.

Car nous souhaitons offrir une forme de communauté beaucoup plus humaine, qualitative, organique et vivante ! Et toujours s’offrir le luxe de la flexibilité et de l’adaptabilité. 

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Quelle est selon vous la recette d’une communauté d’acteurs durable en Martinique ?

  • Pouvoir créer des synergies de coopération, partager ses connaissances, être dans le développement de dynamiques d’intelligence collective pour travailler ensemble sur des outils qui pourront être appliqués au sein de la communauté mais également être dupliqués dans les activités respectives de chacun.e. 

  • S’affranchir des cadres (adhésion, lieu fixe, type de personnes…), donner la liberté d’entrer et d’en sortir, viser la diversité des profils pour générer un vivre ensemble dans l’acceptation de l’altérité et de l’humanité. 

  • Avoir une vision claire des membres et des valeurs partagées (Pourquoi sommes-nous là ? Dans quelle direction allons-nous ?)

  • Réussir à dépasser ses craintes, ses peurs et à laisser de côté ses intérêts personnels, afin d’agir dans l’intérêt de la communauté apprenante et de sa pérennité. 

  • Donner l’accès au savoir et à l’information (la vraie !) au plus grand nombre.

Voilà pour l’essentiel. On rajoutera de ne pas hésiter à varier les lieux d’animation afin d’augmenter les opportunités de développement de la communauté du Nord au Sud de l’île.

C’est d’ailleurs pour cela que nous organisons nos rendez-vous dans des espaces différents, tels que des lycées, écoles, quartiers, exploitations agricoles, pépinières d’entreprises ou encore espaces publics, en divers endroits de l’île. 

L’innovation naît d’accidents, d’opportunités de rencontres qui ne sont pas forcément fléchées ! Et c’est en cela que le lieu peut être facilitateur. 

Les outils sont-ils facilitateurs ? Y a t-il des outils nécessaires pour animer une communauté ? 

Victoria Elisabeth, contributrice : Nous croyons en la pertinence des outils d’intelligence collective et de co-création, des outils ludiques reposant sur le jeu pédagogique, avec des formats permettant aux uns et aux autres de se les approprier et d’être co-contributeurs du contenu ! 

La part du numérique ? Facilitateur mais pas exclusif ! Un part significative de nos bénéficiaires et clients n’ont que de faibles usages du numérique dans le champ professionnel.

« Nous sommes très vigilants à ne pas exclure par le numérique et notre force est de nous inscrire dans un accompagnement multimodal et de terrain. »

Comment rejoindre votre communauté ? 

Cassandra Bérénice, chargée de mission : Nous allons dès avril proposer différents formats de rencontres, d’échanges et de co-développement, qu’il s’agisse de living labs ou encore de dynamiques collectives d’entrepreneurs, jeunes et autre contributeurs; des moments où nous travaillerons sur une problématique d’entreprise ou de territoire à résoudre et au cours desquels nous expérimenterons la ou les réponses de la façon la plus précise et la plus opérationnelle possible. 

Faire partie d’une communauté apprenante, c’est apprendre des choses que tu n’imaginais même pas apprendre, progresser et faire progresser ton activité et les autres, et c’est cela qui est enrichissant. C’est différent de ce qu’on pourrait proposer en n’étant qu’un cabinet de conseil…

Vous souhaitez en savoir plus? Contactez Cassandra au 06 96 06 81 99 ou Victoria au 06 96 06 09 72 ou contactez-nous par email.

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