La crise amorcée depuis mars 2020 a rebattu les cartes de nos économies. Y a-t-il aujourd’hui des secteurs dans lesquels il vaut mieux entreprendre ? – Texte Axelle Dorville

Sur la plateforme dédiée à la création d’entreprise de Bpifrance, un article regroupe les conseils pour trouver « la bonne idée » d’entreprise, et invite notamment à « repérer ce qui vous complique la vie »  et « enquêter sur les besoins de ses proches ». Dans la littérature dédiée à l’entrepreneuriat, une règle prévaut ainsi : répondre à une problématique de marché est le meilleur moyen de trouver une clientèle et d’assurer la viabilité de son projet. Face aux nouvelles dynamiques socio-démographiques, aux perspectives climatiques, aux mutations des usages, de nouveaux besoins se dessinent. 

Responsabilité et engagement  

Le 24 juin 2021 se tenait la finale du challenge Mo Pitch organisé par French Tech Guyane. Le 1er prix général : Belpair, un concept de nettoyage, restauration et customisation de sneakers. Au 1er prix de l’entrepreneuriat au féminin : Merci Guyane, le Too Good to Go guyanais permettant la mise en relation des commerces de bouche ayant des invendus, avec les consommateurs cherchant à s’alimenter à petits prix. Et en coup de cœur du jury, Yana Palm, dédiée à la fabrication de vaisselle biodégradable conçue à partir de feuilles mortes de palmier.

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« Nous avons été très surpris de constater l’importance de l’entrepreneuriat social et environnemental comme moteur de l’innovation pour cette édition du challenge », explique Vincent Reboul, président de French Tech Guyane. Un bon tiers des projets pitchés avaient ainsi pour base le recyclage, l’économie circulaire ou encore l’upcycling. Il faut dire qu’en quelques années l’intérêt des consommateurs pour les biens et services éco-responsables s’est largement accru, en même temps qu’a grandi la conscience des entreprises et des entrepreneurs. En 2020, l’enquête Key Consumer Data de la commission européenne révélait que 23 % des consommateurs considéraient l’impact environnemental de la majorité de leurs achats (contre 18 % en 2014). 67 % déclaraient par ailleurs choisir des produits plus respectueux de l’environnement, même lorsque cela leur coûtait davantage. « C’est une vraie tendance de consommation », analyse Vincent Reboul. 

« Quel que soit le projet, quel que soit le domaine, il est aujourd’hui indispensable pour une nouvelle entreprise d’apporter de l’innovation »

Vincent Reboul, French Tech Guyane

Le rôle de la tech 

Les confinements aidant, il n’échappe aujourd’hui plus à personne que la tech joue également, et sera amenée à jouer un rôle de plus en plus important dans le développement de nouvelles entreprises sur nos territoires. Les besoins sont ainsi de plus en plus nombreux : la digitalisation des services des entreprises, le développement du click & collect, la facilitation du télétravail et du travail collaboratif à distance, la « medtech » désignant les produits et services technologiques destinés au secteur médical…

En Guadeloupe, si historiquement l’entrepreneuriat dans la tech consistait essentiellement en des services permettant de répondre aux besoins des entreprises (création d’agences de réalisation de site internet, développeurs ou community managers indépendants), les porteurs de projet de l’île se saisissent de plus en plus des enjeux liés à la santé ou encore à l’amélioration des services publics, constate Sébastien Célestine, président de GuadeloupeTech.

« À partir du moment où vous êtes capable d’améliorer l’expérience du client et/ou de l’entreprise, vous êtes sur un secteur porteur car vous avez potentiellement des clients prêts à payer vos produits ou services. »

Sébastien Célestine, GuadeloupeTech

De la santé aux services publics, le bon secteur est ainsi celui pour lequel il existe des « points de douleur » qui doivent être solutionnés. Et à bien y regarder, tous les secteurs économiques peuvent évoluer grâce aux nouvelles technologies et se moderniser pour mieux répondre aux besoins et usages. « Tous les secteurs économiques présents en Guadeloupe sont porteurs », résume ainsi Sébastien Célestine. À titre d’exemple, le sujet de l’eau qui concerne une majeure partie de la population guadeloupéenne et pour lequel « de nouveaux outils ont été créés par des entrepreneurs afin de pouvoir améliorer ce service et éviter le gaspillage de cette ressource vitale ».

Entre autres opportunités au niveau national, le media Capital cite également l’intérêt croissant pour le Do It Yourself, le développement des services de bien-être à domicile, et notamment pour les personnes âgées, ou encore la digitalisation des pharmacies. « Il ne faut pas se poser de limites », explique le président de Guadeloupe Tech, également créateur de la société All Mol et repreneur de La Librairie Générale. « À partir du moment où vous êtes capable d’améliorer l’expérience du client et/ou de l’entreprise, vous êtes sur un secteur porteur car vous avez potentiellement des clients prêts à payer vos produits ou services. »

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Au-delà du secteur 

Ainsi, les secteurs plus « traditionnels » de la restauration, de l’agriculture, de l’industrie, de la santé, de l’énergie et du gaspillage alimentaire sont autant de domaines dans lesquels l’entrepreneuriat peut être porteur de solutions innovantes, pour faciliter la vie des professionnels comme des consommateurs. « Quel que soit le projet, quel que soit le domaine, il est aujourd’hui indispensable pour une nouvelle entreprise d’apporter de l’innovation », défend Vincent Reboul. « La réussite réside surtout dans la capacité à s’adapter et à trouver des solutions face à l’évolution permanente du marché dans lequel l’entrepreneur tente de se faire une place », ajoute Sébastien Célestine. « On parle beaucoup de résilience entrepreneuriale depuis quelque temps et c’est pour moi un des aspects primordiaux chez l’entrepreneur, qui doit être capable de garder le cap quand le bateau tangue. » Avec toujours en ligne de mire, les besoins de son marché. 

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