IGUAVIE. L’interprofession de la viande et de l’élevage s’adapte aux problématiques du territoire pour valoriser la production locale de porc. Rencontre avec son Secrétaire Général, Élie Shitalou. – Texte Audrey Juge

En deuxième place des viandes consommées en Guadeloupe après la volaille, le porc nécessite d’être encouragé dans le développement de sa filière pour tendre vers la souveraineté alimentaire. Or, aujourd’hui, le marché local de la viande fraîche porcine butte contre la saturation des étals. Quelles alternatives pour les producteurs ? Selon Elie Shitalou : « L’un des axes de développement serait la transformation ».

Un contexte mitigé

En Guadeloupe, quatre grands secteurs économiques dessinent le paysage agricole : la culture de la banane dessert, celle de la canne, les fruits et légumes à travers l’IGUAFLHOR et les filières animales à travers l’IGUAVIE. « Ces deux interprofessions regroupent les acteurs qui approvisionnent le marché intérieur guadeloupéen », explique Élie Shitalou.

Créée en 2004, l’IGUAVIE s’articule autour des 5 professions présentes : les producteurs de viande, le provendier (producteur d’alimentation animale), les transformateurs (abattoirs, ateliers de découpe, charcuteries), les GMS (grandes, moyennes et petites surfaces) et les artisans bouchers. Une coopération structurée dont l’enjeu principal reste l’autosuffisance alimentaire du territoire.

« Nous aurions besoin d’une réglementation pour permettre à la production locale de se vendre sur le marché local, mais aussi que la transformation du porc soit plus encouragée. »

« Cette ambition est, selon moi, tout à fait réalisable. L’Europe et la Région nous accompagnent remarquablement, mais nous ne produisons pas plus parce que le marché local de la viande fraîche est saturé ! Nous aurions besoin d’une réglementation pour permettre à la production locale de se vendre sur le marché local, mais aussi que la transformation du porc soit plus encouragée », déclare Élie Shitalou. 

Valoriser le porc guadeloupéen

Seulement 24 producteurs se partagent le secteur porcin, regroupés au sein des coopératives COOPORG et Karukera Porc, pour une production totale annuelle d’environ 1 500 tonnes, soit près de 95 % de la production globale de l’archipel.

« La transformation doit gagner des parts de marché dans les GMS sur la viande et les produits porcins surgelés importés. »

Avec un marché local de viande fraîche saturé, la stratégie de l’IGUAVIE est de s’orienter donc vers une plus grande transformation du porc : « Que ce soit en produits charcutiers comme les saucisses ou les pâtés, en plats cuisinés ou en découpe pour la restauration hors foyer, la transformation doit gagner des parts de marché dans les GMS sur la viande et les produits porcins surgelés importés ».

Et de ces nouvelles parts de marché gagnées découleraient l’installation de jeunes producteurs et transformateurs supplémentaires, la création d’emplois, des prix plus accessibles à tous et une sécurité alimentaire garantie. « Les consommateurs peuvent agir en favorisant le porc local frais ou transformé. Il en va également de notre santé et de celle de nos enfants, que le porc local nous garantit grâce à une qualité d’élevage certaine et une traçabilité détaillée. »

Il n’existe aujourd’hui que 4 unités de transformation sur le territoire : Cochon pays Guadeloupe, Unic Porc, La Boudinière et la Ferme de Desmarais. La transformation du porc guadeloupéen a donc un bel avenir devant elle.

“Produire tout ce qu’on vend”
L’exemple de Manuel Mondongue, gérant associé des boucheries, du laboratoire et du restaurant La Boudinière.

Pour Manuel, transformer le porc est une histoire de famille. Son grand-père et son père, anciens producteurs de porcs, lui ont transmis cette passion qu’il perpétue aujourd’hui dans une optique « 0 déchet ». Avec les deux boucheries, le laboratoire et le restaurant, Manuel fait de la découpe de viande, de la charcuterie et des salaisons, des produits traiteurs, dont les fameux boudins, et des plats cuisinés. Les os sont eux utilisés pour créer des fonds et des bouillons pour les préparations.

« Notre objectif est de produire tout ce qu’on vend, des produits de qualité et sains, en limitant notre empreinte carbone. »  À ce titre, le jeune entrepreneur se lance dans la production porcine biologique et enchaîne les recherches pour un système d’exploitation plus écologique au travers d’équipements à énergie solaire. 

Une motivation qu’il souhaite contagieuse : « Il y a de la place pour les transformateurs, j’encourage les jeunes à se former et à s’installer car la transformation agro-alimentaire est l’une des principales voies pour gagner des parts de marché, créer des emplois et produire de la richesse locale ».

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