Pas la peine de chercher bien loin pour rencontrer Carole Cotellon. Il suffit d’aller à la base nautique de Sainte-Anne, là où elle a eu ses premières amours et où, à présent, elle vit ses plus grandes passions.

Un calme puissant au coeur de la tempête

Il est 8 h. Le soleil déjà haut dans le ciel, embrase le sable de la plage. Il est tôt mais l’effervescence est là. Les voiles se hissent, les étais se bordent. Les marins aux lycras colorés se saluent en riant. On s’entraide, on se taquine. En retrait, quelques passants, supporters et touristes admirent émerveillés ce joyeux chahut. Vous l’aurez compris, vous êtes au départ d’une course de voile traditionnelle.

Au beau milieu de l’agitation, Carole Cotellon se tient prête. Elle observe avec sa force tranquille. Un rocher qui tient bon face au courant d’une rivière en crue. Son visage est toujours souriant, ses manières sereines. Cette impassibilité cache pourtant mille émotions qui papillonnent au creux de son ventre. Elle s’inquiète : « Est-ce que tout va bien se passer ? Est-ce qu’on va prendre le départ à l’heure ? » Elle explique en riant :

« Ces dernières années, j’ai appris à gérer un peu plus chaque jour ma nature impulsive. Souvent, les équipiers cherchent un peu de quiétude avant les départs de courses. C’est mon devoir qu’ils prennent la mer en confiance. »

À terre, la vice-présidente de l’ANASA et son groupe de bénévoles sont chargés de la logistique. Cette équipe, sans qui rien ne serait possible, est majoritairement composée de femmes passionnées : « Nous sommes un peu les mamans et taties de la flotte. » Dans l’ombre des canots et sous les chapiteaux de ravitaillement elles s’activent comme des petites fourmis.

« Avant de m’engager dans la voile traditionnelle, je ne percevais pas autant les satisfactions qui pouvaient naître du bénévolat. Aujourd’hui, je n’arrêterais pour rien au monde ! »

Carole Cotellon © Cédrick Isham Calvados
Carole Cotellon © Cédrick Isham Calvados

Une passion pour la mer et la transmission

Ses yeux sont perpétuellement braqués sur l’horizon, ils surveillent la progression des voiles colorées. La VHF crépite et commente la course depuis la mer, Carole raconte : « La voile traditionnelle, c’est un monde à part. On véhicule l’essence de la Guadeloupe. Nos valeurs fortes : l’entraide, le respect, le partage, la persévérance, la convivialité… Je suis honorée et fière d’avoir été adoptée par cette grande famille de passionnés. Je ressens cet amour maternel pour chaque membre de la flotte.

À chaque évènement dans la course, j’ai le cœur qui bat à mille à l’heure. » De jour comme de nuit, la professeure des écoles à Sainte-Anne ne s’arrête jamais. Elle concocte sans cesse de nouveaux projets pour les générations futures. Membre actif depuis les premiers frémissements de la base nautique, elle a participé à faire naître l’ANASA, ce projet visionnaire qui cherche à reconnecter les Guadeloupéens à la mer. Si Carole a aujourd’hui le cœur marin, c’est grâce à son père qui l’a poussée à dompter l’océan.

« J’avais un rapport ambigu à la mer, une peur des algues et du grand bleu. La mer, c’est vertigineux ! Mais une fois que l’on apprivoise cet univers, on ne peut plus s’en passer. Avec l’ANASA, on veut inspirer des vocations marines au plus grand nombre. »

Son nouveau cheval de bataille ? S’engager dans la transmission. Ancrer nos savoir-faire de marins. Valoriser ce patrimoine si unique. Et que l’on fasse voguer, sur nos belles eaux, ces canots saintois. Portés par les alizés pour toujours.


Retrouvez cet article dans le hors-série Portraits Guadeloupe de mars 2024.