Fort d’une expérience de plus de 25 ans dans l’agriculture en métropole notamment, Charles Carbo est venu tenter l’aventure du bio en Guyane en 2004. C’est à Sinnamary, dans un cadre naturel parmi 240 hectares de forêt et de savane que l’agriculteur a trouvé le cadre propice au développement de son activité. Loin des bruits et de la pollution de la ville, celui qui se décrit comme un « anti-citadin » élève ici en toute quiétude ses buffles et produit ses propres fruits et légumes, accompagné par son épouse.

Si l’on entend partout que le bio c’est bien, sait-on
pourquoi ?

La production bio respecte la loi du vivant et le rythme de la nature. Si durant longtemps c’est cette agriculture, dite traditionnelle, qui a dominé, la loi du marché, la recherche de profit et la concurrence accrue ont contribué au déve-loppement d’une agriculture dite aujourd’hui conventionnelle, permettant de produire de tout, en toute saison et en très grande quantité. À contre-courant de cette dynamique, M. Carbo se définit comme un militant de l’agriculture durable. « Oui ce type de production nécessite plus de travail pour lutter contre les parasites, mais au bout du compte l’agriculture n’est-elle pas un pilier de notre société, au même titre que l’éducation ou encore la culture ? ».

Les convictions, plus fortes que les contraintes

Si le « produire bio » fait partie de ses convictions, M. Carbo n’ignore pas pour autant les contraintes, notamment climatiques, auxquelles ce type de production est confronté.
« Nous devons nous adapter, surtout avec une saison des pluies aussi marquée que celle que nous vivons actuellement ». Avec des conditions climatiques extrêmes, il est plus que nécessaire, selon l’agriculteur, de faire évoluer les modes de cultures mais aussi de développer les partena-riats avec nos voisins plus expérimentés. C’est dans cette perspective qu’une récente association avec la région de l’Amapa au Brésil permet aux acteurs du bio en Guyane de partager des expériences dans le but de favoriser la production traditionnelle, et de limiter l’impact des pesticides sur les terres agricoles.

Une autre contrainte liée à la production concerne son coût de fonctionnement. En effet, la législation impose aux agriculteurs bio des conditions drastiques en termes de contrôle et de taxes. Dès lors, et pour ne pas que les consommateurs pâtissent de ces coûts, il revient au producteur, selon M. Carbo, de mettre en place des circuits de distribution alternatifs aux circuits classiques, ces derniers étant pour l’heure inadaptés à la filière bio. C’est dans cette
dynamique que le maraîcher a créé « Les paniers citoyens »,
une association qui permet la distribution de paniers garnis en fruits et légumes bio, à des consommateurs soucieux de consommer de manière équitable, tout en contribuant à la préservation de leur environnement. Le principe de la structure est celui d’une association pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP). Un contrat est établi entre le producteur et le consommateur sur plusieurs mois et promet au consommateur la livraison d’une diversité de produits bio chaque semaine, tout en garantissant au producteur l’écoulement de ses fruits et légumes. Si la clientèle de M. Carbo est uniquement Kouroucienne pour l’instant, il espère à terme pouvoir répondre à une plus large demande, en constante progression. « La population devient sensible à la protection environnementale et au concept de consommation responsable. Il y encore beaucoup de chemin à faire, mais ça vient ! ». Optimiste, M. Carbo fait confiance à la nouvelle génération de consommateurs, mais aussi aux jeunes étudiants qui s’orientent toujours davantage vers la filière bio.

Par éva Zonca