Pauline Montauban est la fondatrice de Maison Victoire, un hôtel inauguré il y a un an dans le centre-ville de Pointe-à-Pitre. Une maison réhabilitée, rénovée, ravivée avec goût pour promouvoir un mode de vie local, qui relève, selon elle, de l’art.

Un héritage culturel transformé en art de vivre

Elle tire un livre d’une étagère, la tranche un peu abîmée d’avoir été trop ouverte. « Cet ouvrage sur l’art de vivre aux Antilles appartenait à mes parents », explique Pauline Montauban, jeune trentenaire à l’origine du projet Maison Victoire, hôtel pointois dont l’élégance vient rappeler l’âge d’or d’une ville qui peine à se relever des années d’abandon.

La quête de l’élégance dans chaque espace

Le raffinement et l’élégance, chez Pauline, ce n’est ni un goût ni une appétence. C’est une condition sine qua non de son bien-être, presque un handicap, assure-t-elle. « Lors d’un voyage en Amazonie, j’ai changé d’hôtel car je me sentais mal dans celui qui nous avait accueillis. » Aménager un espace relève de l’art, affirme-t-elle. Même étudiante, elle choisissait soigneusement ses logements, elle y cherchait une âme, une élégance. Quant à la compétence pour pratiquer ce qu’elle nomme « l’art d’habiter », elle dit la tirer de sa mère qui, très tôt, l’a initiée à l’art et à l’architecture. Malgré des études scientifiques et un métier d’ingénieur, elle a conservé, depuis son enfance, un penchant immodéré pour les bâtiments.

Maison Victoire © Jude Foulard
Maison Victoire © Jude Foulard

« La beauté et le beau » : une vision partagée

« Sur 10 000 photos dans ma photothèque, il doit bien y en avoir 6 000 rien que de façades d’immeubles », note-t-elle très sérieusement. « En faisant Maison Victoire, j’avais envie, outre de prouver qu’on pouvait être le changement qu’on promeut, de rappeler que la culture créole a du raffinement en elle. Que l’art de vivre, ici, peut être inscrit dans ce que j’appelle une certaine idée de la beauté et du beau. »

Pour meubler la Maison, Pauline écume les marchés, les brocantes et les espaces où s’échangent les objets de seconde main. Elle rêve de voir s’installer dans son île chérie une cohorte d’artisans d’art, où trouver les beaux objets qui viendront meubler les autres maisons qu’elle compte ouvrir dans d’autres communes. Quitte à être le mécène d’une telle filière.

« On va ouvrir le fonds Victoire pour permettre à des profils artistiques d’émerger », note celle qui promet de mettre 5 % des retombées financières de son activité hôtelière dans ce projet.

Pauline Montauban © Jude Foulard
Pauline Montauban © Jude Foulard

Une discrète influenceuse de l’art de vivre

Quand elle en parle, elle est presque gênée. Elle n’aime pas être sur le devant de la scène, briller, étaler son succès, son parcours. Elle aime savoir que ses idées plaisent, mais les incarner ne l’intéresse pas vraiment. La notoriété l’effraie même un peu.

Elle a d’ailleurs mis longtemps à accepter l’interview et a préféré nous recevoir dans un lieu sûr, confortable et rassurant : son domicile saint-franciscain, discrètement installé à l’abri des regards et de la route, posé dans un joli jardin d’où proviennent les fleurs de ses bouquets. Parce que, les bouquets, c’est une affaire personnelle.

Chaque semaine, elle change les fleurs fraîches qui viennent orner les pièces de l’hôtel de la rue Barbès mais aussi de sa maison, des fleurs locales, toujours. « Je les cueille dans mon jardin, celui de ma tante, ou je les achète aux fleuristes dans Pointe-à-Pitre. » Pauline arrange les fleurs, les dispose dans les vases, pour parfaire le décor de l’endroit. Une touche discrète, mais indispensable à l’ornement des intérieurs. De l’art, encore.


Retrouvez cet article dans le hors-série Portraits Guadeloupe de mars 2024.