Elle se rêvait danseuse étoile mais avive chaque soir la scène du Crazy Horse, le mythique cabaret parisien. Trop grande et trop métissée pour le classique, la volcanique Inès Joseph, alias Nini Pompéi, s’affiche aujourd’hui plus épanouie que jamais.

Vous montez ce soir sur la scène du Crazy Horse pour un nouveau show. Vous en avez parcouru du chemin depuis vos premiers pas de danse à 7 ans, en Guadeloupe…

Oui, c’est sûr ! J’enchaînais entre l’espace Warnier et l’école Aida, à Basse-Terre. J’étais folle amoureuse de danse classique, plus encore que nos danses traditionnelles. Le classique, c’était l’exotisme pour moi ! J’ai été repérée à 14 ans et j’ai pu choisir entre l’école de ballet de Biarritz et l’Institut international Janine Stanlowa, à Paris. Paris représentait l’art, la culture. J’étais fan d’histoire, moins de surf ! J’allais pouvoir vivre mon rêve, en espérant intégrer un jour l’Opéra de Paris ou le Conservatoire.

Vous performiez, mais tout n’a pas été simple…

J’arrivais première à chaque examen, on me disait que j’étais extraordinaire mais, au fil des auditions, on m’a fait comprendre que ma grande taille et mon métissage allaient me limiter. Sur pointes, je mettais une tête aux danseurs, qui préféraient porter des petites crevettes. On m’a conseillé de faire du jazz ou du contemporain. C’était assez déprimant car je ne pouvais pas m’exprimer pleinement. Et un jour, une agence de mannequins m’a contactée.

Vous avez donc tiré un trait sur votre rêve de danseuse étoile ?

J’ai dû faire mon deuil, oui, mais j’ai vite compris que des portes allaient s’ouvrir, surtout que je n’avais pas coupé avec la danse. J’ai découvert d’autres genres, d’autres compagnies. J’ai passé deux mois au Harlem danse théâtre, j’ai aussi vécu en Australie. Et à 18 ans, j’ai pu intégrer Le Paradis Latin, le cabaret moderne de Kamel Ouali, qui est un père spirituel pour moi. Je suis heureuse de ne pas m’être enfermée dans un style, ça aurait pu me briser le mental. Je n’ai pas fait exactement ce que je voulais à l’origine, mais j’ai suivi ma bonne étoile.

Comment êtes-vous arrivée au Crazy Horse ?

Un peu par hasard, plusieurs collègues passaient les auditions. On m’a dit que j’avais le physique mais que j’étais un peu grande (1,75 m). Disons que ma cambrure, qui est la marque de fabrique du Crazy, a fait la diff’ !

Le Crazy a pu avoir une image un peu sulfureuse…

C’est tellement loin de la réalité. Je le vois surtout comme un écrin, où les femmes sont représentées telles des œuvres d’art, des bijoux. C’est un cabaret résolument moderne, qui a toujours été en avance sur son temps, avec des femmes inspirantes. J’ai vite été émerveillée, subjuguée par le show et les danseuses.

Comment est né ce nom de scène, Nini Pompéi ?

Nini, on m’appelle comme ça depuis que je suis petite. Et j’ai toujours adoré l’archéologie et la culture italienne. Je vais d’ailleurs souvent à Naples. Ce nom collait aussi à mon tempérament. Quand ça explose, ça explose ! Mais je ne sais pas si j’ai hérité ça de mon papa guadeloupéen ou de ma maman bretonne.

Ines Joseph et Nini Pompéi sont-elles une seule et même femme ?

Il y a un peu de Nini chez Inès et un peu d’Inès chez Nini. Forcément, quand je monte sur scène, j’incarne mon personnage mais je conserve mes propres émotions. On ne perd pas notre personnalité, elle ressort forcément pendant le show. Ce personnage, c’est une part de moi, que je fais évoluer. Dans la vraie vie, on m’appelle aussi parfois Nini. Elle n’est jamais bien loin.

Vous aimez revenir en Guadeloupe. L’île vous manque-t-elle ?

Je n’y ai pas vécu mon adolescence, alors oui, il me manque quelque chose. En février, j’ai eu la chance de défiler avec le groupe Magistral de Basse-Terre, c’était magique. On l’avait déjà fait l’an dernier avec Indira (Ampiot, miss France 2023). Les Guadeloupéens font des choses extraordinaires, on ne parle pas assez du positif face à tous les préjugés. J’espère pouvoir un jour transmettre quelque chose là-bas, autour de la danse bien sûr.

Lire Aussi | Indira Ampiot, sacrée Miss France 2023 : “Je vis un rêve éveillé”


Retrouvez cet article dans le hors-série Portraits Guadeloupe de mars 2024.